tartan

Vous ne connaissez pas Robert Burns, le barde poète national écossais, le plus grand auteur en langue scots ?
Pourtant, tous les écossais, dont la première langue est majoritairement l'anglais, ou pour être plus précis, le scottish english, fêteront le 25 janvier prochain sa naissance (1759 -1796), à grand renfort de whisky et de haggis (la panse de brebis farcie).
Ils considèrent que le poème en langue scots de Robert Burns "Auld Lang Syne" est l'hymne national de la nouvelle année.
Ils ne sont pas les seuls.
Au Japon, cette mélodie est très célèbre sous le nom de « Hotaru no hikari ». Fin mai, début juin, les japonais sortent de chez eux pour admirer la lueur (hikari) des premiers vols de lucioles (hotaru). Cette mélodie est également utilisée à la même époque lors de la remise des diplômes de fin d'année scolaire.
A Taïwan, c'est un chant de ralliement ; en coréen, nommé Aegukga, il signifie « chant de l’amour de la nation ». Il fut jusqu'en 1948 considéré comme l'hymne national.
"Jusqu'à ce que les vagues de la mer orientale soient sèches, (et) le mont Baekdusan éloigné, Dieu protège notre terre pour toujours, notre pays pour toujours. Comme un solide pin du mont Namsan, debout pour son devoir, vent ou froid, jamais changeant, est résolue notre volonté. Dans la courbe du ciel de soirée, bleu cristal et sans nuages d'automne, soit la lune radiante notre esprit, immuable, simple et vrai. Avec une telle volonté, (et) un tel esprit, fidélité, cœur sur la main, laissez-nous aimer, vient peine, vient joie, c'est notre terre aimée."
Auld Lang Syne
a été décrite, à juste titre, comme la chanson que personne ne connaît, mais que tout l’univers anglo-saxon, voire anglophone, chante pour dire adieu à l’année qui se termine et saluer celle qui débute.
Elle est considérée depuis le 19ème siècle comme l'hymne de la franc-maçonnerie écossaise.
Ce poème et la chanson correspondante vous est très connue, puisque qu'en français ce poème a pour titre "ce n'est qu'un au revoir mes frères" !

Un extrait du poème dans la langue de Burns, en scots, évidemment :

Chorus.
And for auld lang syne (old long past), my jo (sweetheart),
For auld lang syne (old long past),
We'll tak (e) a cup o' kindness yet,
For auld lang syne (old long past),

Should auld (old) acquaintance be forgot,
And never brought to mind ?
Should auld (old) acquaintance be forgot,
And days o' auld lang syne (of old long past)...

Traduit en français
Faut-il oublier les vieux amis,
et ne jamais ressusciter leur mémoire ?
Faut-il oublier les vieux amis,
et le temps jadis.
En l'honneur du temps jadis, mon ami,
en l'honneur du temps jadis,
Levons notre verre
au temps jadis !

Malheureusement, les paroles que nous utilisons, sont celles, écrites en 1920, par le père Jacques Sevin, fondateur du scoutisme français ! Il n'est plus question de lever son verre.
Faut-il nous quitter sans espoir
Sans espoir de retour
Faut-il nous quitter sans espoir
De nous revoir un jour ?

Robert burns, franc-maçon, écrivit les paroles d'Auld lang Syne lors du décès de l'un des frères de sa loge. Il fut initié le 4 juillet 1781, à 23 ans, à St. David's Lodge, Tarbolton Scotland, loge qui existe encore aujourd'hui. Il fut ensuite affilé à cinq autres loges, et les free masons écossais affirment qu'Il demeura toute sa vie (fort courte) un maçon enthousiaste.

Burns, démocrate, soutiendra activement la Révolution française. Il aurait participé au chant du "ça ira" au Théâtre Royal. Menacé de perdre son emploi du fait de ses prises de positions, Il adoptera une attitude "silencieuse et obéissante". A cette époque, l'attachement déclaré des écossais aux idéaux de la Révolution française et les liens affectifs de tradition entre l'Ecosse et la France, depuis la "Auld Alliance" unissaient les deux pays contre l'Angleterre.
Une certaine histoire littéraire a estompé son anticléricalisme et voulut oublier son penchant pour une franche grivoiserie, parfois pornographique.

Depuis 200 ans, le 25 janvier tous les écossais se réunissent en famille, ou avec des amis, pour un souper en l'honneur de Robert Burns. Cette fête, toujours joyeuse, a généralement un déroulement bien défini. On y récite des poèmes de Burns, on déclame, on y danse et on y chante au son des cornemuses. Le souper Burns doit toujours être empreint de l'ensemble des émotions de la vie.
Après la soupe, commence le grand cérémonial : cornemuse, présentation du haggis (en main droite) et texte de l'ode au Haggis (en main gauche). Tout le monde doit se lever, applaudir ce fameux plat (panse de brebis, farcie d'un mélange de mouton haché, d'abats, de farine d'avoine et d'épices - c'est délicieux). Les verres de whisky sont levés, puis le haggis (du français hachis) est découpé et servi à chacun des invités.

Pour les gourmets, j'ajoute qu'à l'époque de Burns, et peut-être aujourd'hui encore dans quelque endroit de l’Écosse profonde, le repas comprenait également le Powsowdie (bouillon de tête de mouton), le Cabbie-claw (morue accompagnée d'une sauce au raifort et aux oeufs) et les Finnan toasties (haddock fumé).

Ode au Haggis

Bénie soit votre honnête et attrayante face
Grand chef de la race des puddings !
Au-dessus d'eux tous vous prenez place,
Panse, tripes ou boyaux :
Vous êtes bien digne d'un bénédicité
Aussi long que mon bras.

Voilà que vous remplissez le tranchoir qui gémit,
La croupe semblable à une montagne lointaine,
Votre broche servirait à racommoder un moulin
En cas de besoin,
Tandis que par vos pores coulent des gouttes
Semblables à des grains d'ambre.

Voyez le Travail rustique apprêtrer son couteau
Et vous couper avec dextérité,
Creusant vos belles entrailles ruisselantes,
Comme un fossé ;
Et alors, oh ! quelle vue glorieuse,
Une vapeur chaude et succulente !

Alors cuillers contre cuillers s'allongent et luttent,
Le diable emporte la dernière, ils poussent en avant,
Jusqu'à ce que leurs ventres tout gonflés bientôt,
Soient tendus comme des tambours ;
Alors le vieux maître de la maison, quasi près de crever,
Marmotte les grâces.

Est-il un homme qui devant son ragoût français,
Ou une olla qui donnerait une indigestion à une truie,
Ou une fricassée qui la ferait vomir
A force de dégoût,
Regarde d'un oeil moqueur et méprisant
Un pareil dîner ?

Pauvre diable ! voyez-le devant ses rogatons,
Et faible comme un roseau desséché ;
Sa jambe grêle est une vraie lanière de fouet,
Son poing une noix.
Lui, se jeter à travers la mêlée et le flot sanglant,
Il en est incapable !

Mais observez le paysan nourri de haggis,
La terre tremblante résonne sous son pas ;
Mettez une lame à son large poing,
Il la fera siffler,
Et il coupera jambes, bras et chefs,
Comme des têtes de chardons.

Ô vous, puissances, qui prenez soin des hommes
Et leur dressez leur menu,
La vieille Écosse n'a pas besoin de fricot liquide
Qui rejaillit dans les écuelles :
Mais, si vous souhaitez sa prière reconnaissante,
Donnez-lui un haggis !


Vous voila donc prêt à fêter Robert Burns, barde, poète, romantique et joyeux.
Si vous êtes à Paris le 24 janvier au soir, allez au Pub écossais Auld Alliance, 80 rue François Miron dans le 4ème. C'est à ne pas rater !